Effet de serre : qu’est ce que c’est?

L’essentiel sur l’effet de serre

1 Caractéristiques du phénomène global

L’atmosphère de la Terre retient en partie la chaleur que lui apporte le soleil. Les gaz dits à effet de serre émis par les activités humaines, dont pour 60% (et en proportion croissante) le gaz carbonique venant du charbon, du pétrole et du gaz brûlés, intensifient ce phénomène depuis deux siècles (avec une rétroaction de la température qui accroît à son tour les concentrations de CO2). Selon le troisième rapport d’évaluation du GIEC, fondé en 1988 par les Nations-Unies sous la double impulsion américaine et britannique et dont les résultats constituent depuis le moteur des négociations internationales :

il est certain que les concentrations de gaz carbonique dans l’atmosphère ont atteint des niveaux jamais vus depuis 420 000 ans et évoluent depuis deux siècles à une vitesse jamais enregistrée depuis 20 000 ans[1] ;
la vitesse du phénomène observé (plus d’un demi-degré en un siècle sur le globe) et attendu (de 1,4°C au mieux à 5,8°C de plus, en moyenne globale, en 2100) est cent fois plus élevée que les variations naturellement imprimées au climat de la Terre par ses paramètres astronomiques et traduites dans les alternances entre ères glaciaires et interglaciaires (quelques degrés en 10 000 ans chaque fois) ;
il est pratiquement certain (plus de 99% de probabilité) que le CO2 fossile émis influencera de façon déterminante les concentrations en CO2 de l’atmosphère, devant toute autre source, durant tout le XXIème siècle : si la température moyenne annuelle du globe peut s’élever d’ici 2100 de 1,4°C à 5,8°C, le tiers à une petite moitié de cet écart vient des incertitudes sur les fonctionnements biophysiques planétaires, tout le reste dépend des politiques qui seront adoptées dans les toutes prochaines décennies par l’humanité ;
il est très probable (de 90 à 99% de probabilité) que le dérèglement climatique provoquera des vagues de chaleur plus longues et plus intenses, avec une élévation particulière des températures nocturnes ;
il est très probable (de 90 à 99% de probabilité) que des précipitations de plus en plus intenses et surtout de plus en plus variables d’une année sur l’autre s’ensuivront, notamment dans les latitudes moyennes.

2 Effets observés à ce jour

De nombreux événements météorologiques récents relatés par l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM) ont illustré malheureusement la pertinence des résultats des modélisations du GIEC. Les dernières années ont donné quelques aperçus des risques que ferait courir le changement climatique au continent européen : même si les séries statistiques dont nous disposons sont encore insuffisantes pour attribuer tel ou tel événement météorologique extrême (tempête, inondation, vague de chaleur…) au dérèglement climatique, les faits observés matérialisent fidèlement les résultats du GIEC. Par ailleurs, de fortes modifications dans les écosystèmes (floraisons, migrations, périodes de végétation) et les phénomènes agricoles (dates de récoltes, conditions hydriques) montrent que le changement climatique s’exprime aussi par des évolutions de fond, beaucoup plus rapides que par le passé, auxquelles nous devons également faire face.
Certains effets du dérèglement climatique sont déjà visibles en France : élévation de 0,9°C en un siècle de la température moyenne annuelle ; retrait des glaciers ;l’été2003 correspondent bien aux simulations du GIEC, notamment la chaleur nocturne. Selon Météo-France, cet épisode  « dépassait de très loin tout ce qui a été connu depuis 1873 par son intensité et sa longueur » (4°C de plus sur les températures extrêmes) ; pourtant la température moyenne de 2003 ne devrait pas dépasser de plus de 0,5°C celle de 1998, l’année la plus chaude depuis 1860, illustrant ainsi qu’une modification apparemment faible d’une moyenne annuelle peut recouvrir des phénomènes violents. Ces vagues de chaleur pourraient voir leur fréquence quintupler dans un scénario tendanciel.

3 Une réduction de moitié des émissions mondiales bien avant la fin du siècle est indispensable

 

Les gaz à effet de serre qui s’accumulent dans l’atmosphère sont ceux qui excèdent la capacité d’absorption des « puits » océaniques et continentaux. Seule la moitié du CO2 anthropique étant absorbée par les fonctionnements naturels (océans, biomasse), les résultats du troisième rapport du GIEC montrent qu’il est nécessaire de réduire les émissions globales sous le niveau qu’elles avaient en 1990, et ce bien avant la fin de ce siècle si l’on veut stabiliser les concentrations autour de 450ppm. Ce niveau correspondrait à une élévation finale de température du globe d’environ deux degrés, niveau qui aujourd’hui paraît à même d’éviter dans la durée sinon la perte des écosystèmes coralliens (affectés dès un degré de réchauffement moyen), du moins des événements de très grande ampleur telle une élévation d’environ 5 mètres du niveau des océans (probable avec trois degrés de plus). Or, une planète déjà densément peuplée absorberait plus difficilement que dans les siècles et millénaires passés les migrations induites par l’élévation du niveau marin ou l’intensification de la sécheresse dans les zones déjà arides. Déjà à 550ppm, les dégâts peuvent être importants dans les pays industrialisés, comme le montre par exemple l’étude stratégique britannique publiée en juillet 2003 par le cabinet du Premier ministre Blair, et peser de façon difficilement soutenable sur nos économies.[2]

Maîtriser l’effet de serre excédentaire à ce niveau (soit une élévation maximale de 2°C de la température moyenne de la planète) revient à diviser par plus de 2 les émissions globales, c’est-à-dire, compte tenu des écarts dans les émissions par habitant (1,1tonne équivalent gaz carbonique -teqCO2- pour un Indien, 2,3 pour un Chinois, 6,6 pour un Français, 8,4 en moyenne européenne, 10 pour un Russe, 20 pour un Américain), par 3 à 5 celles des pays industrialisés, vers la moitié de ce siècle[3]. En effet, comme il s’agit d’un phénomène cumulatif, plus nous agirons tard, plus il sera difficile de revenir à un niveau d’émissions absorbable par la biosphère, plus les concentrations dans l’atmosphère seront élevées et plus les dégâts seront importants. Plusieurs pays européens s’accordent sur un objectif de cet ordre de grandeur[4], qui est aussi celui assigné par le Premier ministre à la France.

Compte tenu de la croissance prévisible des demandes énergétiques dans les pays en développement, les seules substitutions énergétiques ne permettraient sans doute que de stabiliser les émissions mondiales au niveau actuel. Pour les réduire de moitié, l’efficacité énergétique moyenne mondiale des produits, procédés, habitats, transports et organisations territoriales devra donc au moins doubler, et au-delà dans les pays industrialisés. Ce contexte fait de l’efficacité énergétique un paramètre-clef de la compétitivité économique dès ce début de siècle.

 

4  Le rôle déterminant du protocole de Kyoto et l’engagement européen

 

Pour réaliser l’objectif ultime de la Convention des Nations-Unies sur le changement climatique, à savoir limiter les concentrations atmosphériques de gaz à effet de serre à un niveau non dangereux pour l’humanité (article 2), la conférence des Parties de Kyoto (1997) a débouché sur un premier pas : le Protocole de Kyoto, qui assigne aux pays industrialisés un premier objectif quantifié pour la période 2008-2012, dite « première période d’engagement ». Il s’agit d’une réduction de 5,5% des émissions des pays industrialisés par rapport à 1990, qui se traduit pour l’Europe par une baisse de 8% à cet horizon, dont une stabilisation des émissions françaises. Le Protocole de Kyoto a été ratifié par l’Union européenne et chacun de ses Etats-membres, et par l’ensemble des pays industrialisés à l’exception de l’Australie (qui met néanmoins en place des politiques de maîtrise de ses émissions proportionnées à son engagement chiffré) et les Etats-Unis[5] (dont de nombreux Etats ont cependant entamé des actions explicites de réduction de leurs émissions).

Pour contenir le dérèglement climatique en cours et respecter son engagement au titre du Protocole de Kyoto, l’Union européenne se dote progressivement d’un programme européen de lutte contre le changement climatique : directive sur l’efficacité énergétique des bâtiments, programme « énergie intelligente pour l’Europe », programme « Marco Polo » pour le développement du cabotage maritime… Elle vient aussi d’adopter une directive mettant en place un marché de quotas négociables concernant d’abord, pour la période 2005-7, le gaz carbonique des principaux émetteurs industriels européens ; les Etats-membres travaillent sur une autre directive définissant les conditions d’articulation des mécanismes de projets (MOC, MDP[6]) avec le marché européen de quotas.

 

[1] celles-ci n’avaient oscillé qu’entre 200 et 290 ppm (partie par million, unité de concentration en volume dans l’atmosphère) durant les 420 000 dernières années, et ont grimpé depuis la moitié du dix-huitième siècle à plus de 360ppm à ce jour.
[2] Rapport de D. King, conseiller scientifique du Premier ministre britannique (site www.foresight.gov.uk). En scénario tendanciel,  perte possible de 10% de son patrimoine bâti et d’une grande superficie côtière par triplement de la vitesse d’érosion
[3] Pour stabiliser à terme (sans exigence particulière d’horizon temporel) les concentrations à 450ppm, il faut diviser par au moins deux les émissions mondiales en 2100 en les faisant décroître dès 2020 pour qu’elles atteignent leur valeur 2000 en 2050 (troisième rapport du GIEC). Mais si, pour éviter une élévation de la température de la planète de plus de 2°C, nous visons cette stabilisation à 450pm dès 2100, cette division doit se faire dès 2050. Comme la capacité cumulée d’absorption océan-biosphère » risque de diminuer à partir de 2050 (le sols des forêts relarguant alors plus que le bois ne capte, et la « pompe » océanique étant ralentie) : « Entre les 30 GtC du scénario maximum, celui pour lequel aucun effort n’est fait pour limiter l’effet de serre et celui certainement souhaitable d’une stabilisation à une concentration pas trop éloignée de sa valeur actuelle, c’est donc à terme un effort de l’ordre d’un facteur 10 qu’il faut réaliser. » G. Mégie, président du CNRS, et J. Jouzel, climatologue, représentant français au GIEC
[4] Exemples : Royaume-Uni : -60% en 2050 par rapport à 1997 ; Allemagne : -40% en 2020 par rapport à 1990 si l’UE s’engage à -20% à cette date en moyenne, et –80% en 2050 par rapport à 1990 étudié ; Pays-Bas : -75 à –80% en 2050 par rapport à 1990.
[5] Comme l’ont montré les négociations, les gouvernements américains savent que la faible efficacité énergétique des Etats-Unis, plus de deux fois inférieure à celle de l’UE, fait aujourd’hui de toute contrainte énergétique globale un avantage économique relatif pour l’Europe.
[6] Mise en œuvre conjointe (MOC) :possibilité pour l’entreprise d’un pays ayant un objectif quantifié de maîtrise de ses émissions au titre du protocole de Kyoto d’investir dans la réduction des émissions d’une installation située dans un autre pays ayant également un objectif quantifié de réduction, et d’en rapatrier les tonnes d’équivalent CO2 économisées au titre de ses performances propres. Mécanisme de développement propre (MDP) : même chose pour un investissement ayant lieu dans un pays en développement. Dans les deux cas, un accord bilatéral des Etats est nécessaire. Cf. pour toutes explications le document « de Rio à Marrakech » disponible à la MIES (effet-de-serre.gouv.fr).

Qu’est-ce que l’effet de serre ?

 

La température moyenne de notre planète résulte de l’équilibre entre le flux de rayonnement qui lui parvient du soleil et le flux de rayonnement infrarouge renvoyé vers l’espace.

La répartition de la température au niveau du sol dépend de la quantité de gaz à effet de serre (GES) présents dans l’atmosphère. Sans eux, la température moyenne serait de – 18°C et la terre serait inhabitable. Leur présence amène cette température à 15°C.

Les gaz responsables de l’effet de serre d’origine anthropique sont le gaz carbonique (CO2), le méthane (CH4), l’oxyde nitreux (N2O), l’ozone troposphérique (O3), les CFC et les HCFC (1), gaz de synthèse responsables de l’attaque de la couche d’ozone, ainsi que les substituts des CFC : HFC, PFC et SF6.

Les gaz à effet de serre sont naturellement très peu abondants. Mais du fait de l’activité humaine, la concentration de ces gaz dans l’atmosphère s’est sensiblement modifiée : ainsi, la concentration en C02, principal GES, a augmenté de 30% depuis l’ère préindustrielle.
Les effets combinés de tous les GES équivalent aujourd’hui à une augmentation de 50% de CO2 depuis cette période.

1 Quel sont les effets de l’augmentation des émissions de GES sur le climat?

 

Le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC (2) ) a rendu en 2001 son troisième rapport scientifique. Il conclut entre autres que :
– depuis 1750, le taux de CO2 dans l’atmosphère a augmenté de 30%, celui de CH4 de 145%.
– depuis la fin du 19ème siècle, la terre s’est réchauffée de  0,6° et on a assisté à une montée du niveau des océans de 10 à 25 cm.
– toutes les analyses confirment l’effet notable des activités humaines sur ces variations, même s’il demeure de nombreuses incertitudes sur leurs évaluations, et surtout sur les conséquences qui peuvent s’ensuivre.
– « La comparaison entre le changement observé dans la température moyenne globale et le résultat des simulations suggère que le réchauffement des cent dernières années n’est vraisemblablement pas dû aux seules causes naturelles et que les caractéristiques géographiques d’un réchauffement dû aux activités humaines sont identifiables dans les observations du climat ».
2 Que peut-on dire pour le futur ?

D’après le rapport du GIEC, d’ici 2100, selon différents scénarios liés au développement de la société, le réchauffement pourrait atteindre 1,4 à 5,8°C et la mer monter de 9 à 90 cm, (ceci principalement sous l’effet d’une dilation thermique de l’eau). La hausse des températures devrait provoquer des cycles hydrologiques plus vigoureux, c’est-à-dire des sécheresses et des inondations plus sévères et une augmentation des précipitations. Une évolution rapide et soutenue du climat pourrait également modifier l’équilibre entre les espèces, et provoquer un dépérissement des forêts, qui sont notamment des puits de CO2.
En France , on prévoit d’ici à 2060, un accroissement de 1°C à 2°C de la température moyenne, avec pour impacts : une redistribution des cartes dans l’agriculture, due à la réduction des cycles de culture; une redistribution des pathologies entre hiver et été; un risque accru de submersion des deltas, des lagunes et des marais maritimes; une redistribution de la flore; une nette diminution de la durée d’enneigement particulièrement en dessous de 1500 mètres d’altitude.
Les projections obtenues sont plus fiables aux échelles hémisphériques ou continentales qu’à l’échelle régionale. On se fie davantage aux prévisions concernant la température qu’à celles concernant le cycle hydrologique.

Pour ce qui concerne l’Europe, les projections concluent plutôt à un réchauffement, accompagné d’une intensification des cycles hydrologiques, dont l’amplitude croîtrait dans la partie nord de l’Europe et diminuerait dans la partie sud. En France (3), l’élévation du niveau de la mer provoquerait l’inondation permanente des espaces côtiers aujourd’hui à peine ou incomplètement émergés. En métropole, les régions les plus concernées sont les espaces deltaïques de la Camargue ainsi que le rivage à lagunes du Languedoc. En outre, dans les DOM-TOM, la hausse des températures des eaux marines peut être néfaste pour les coraux qui pour beaucoup d’entre eux ne survivent pas au-delà de 29° – 30°. Elle est également susceptible d’accroître la fréquence et l’amplitude des cyclones, particulièrement néfastes pour les atolls. L’élévation de la température entraînerait également une nette diminution (de 20 à 30 %) de la durée de l’enneigement dans les Alpes à basse altitude (1500 m). Il est important de souligner que ces prévisions ne préjugent pas de l’apparition d’effets de grande ampleur qui pourraient être liés par exemple à des bouleversements de la circulation océanique.

3 Quels sont les dangers probables liés au réchauffement ?

 

Il est probable que les pays les moins développés et les écosystèmes les plus vulnérables souffriront le plus des changements climatiques. Par un accroissement de la sécheresse entraînant une chute des rendements agricoles dans les zones arides, et donc des risques de famine, par le passage sous le niveau de la mer de zones côtières, d’îles, d’archipels…

D’une façon générale, l’amplitude et la fréquence des orages, des inondations et des crues, des tempêtes ainsi que des cyclones pourraient augmenter, entraînant ainsi une intensification des accidents météorologiques.

Hormis dans les régions froides, où la mortalité due au froid reculerait, le réchauffement climatique aurait essentiellement des conséquences préjudiciables sur la santé humaine. D’une part, le renforcement et l’allongement des périodes de chaleur augmenteraient, principalement dans les villes, la mortalité et les affections cardiorespiratoires; d’autre part, les aires touchées par les maladies infectieuses véhiculées par les insectes tropicaux s’étendraient considérablement.

Enfin, de façon globale, d’après le second rapport du GIEC, le coût des dommages liés à une augmentation de la température de 2,5°C, est estimé à 1,5-2% du PIB mondial. Ce coût se décline en 1-1,5 % du PIB pour les pays développés et il pourrait être très supérieur à 2 % pour les pays en développement.

1) Les CFC et les HCFC sont régis par le Protocole de Montréal.
2) Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a été créé conjointement par l’Organisation météorologique mondiale et par le Programme des Nations Unies pour l’environnement en 1988. Il a pour fonction d’évaluer : (i) les données scientifiques disponibles sur l’évolution du climat, (ii) les incidences écologiques et socioéconomiques de cette évolution et (iii) de formuler des stratégies de parade, dites d’atténuation et d’adaptation. Le GIEC a notamment produit un premier rapport d’évaluation en 1990, et un second rapport d’évaluation en 1995.
3) Un document intitulé « Impacts potentiels du changement climatique en France au XXIème siècle » a été publié par la Mission Interministérielle de l’Effet de Serre et le Ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement.

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