Pile à combustible et lumière

Mini centrale de proximité, la pile à combustible stationnaire pourrait produire simultanément électricité et chaleur pour alimenter maisons, immeubles et industries… le tout proprement et en silence.
Quarante-cinq milliards d’euros en 2030. C’est l’estimation de ce que sera le marché mondial des piles à combustible pour les seules applications stationnaires. Maisons individuelles, immeubles collectifs, centrales électriques… Les piles à combustible devraient aussi envahir ces marchés. Aujourd’hui, les recherches les plus avancées se basent sur la technologie à membrane échangeuse de protons (les PEMFC). Des appareils démonstrateurs sont déjà installés un peu partout aux Etats-Unis et en Europe. En France, le CEA et ses partenaires Air Liquide, Schneider Electric et De Nora ont réalisé à Waziers, dans le Nord, un premier prototype de générateur à PEMFC capable de fournir 250 kilowatts. Néanmoins, les piles à oxyde solide, les SOFC (pour Solide oxyde fuel cell), constituent le véritable enjeu de cette filière. « Si les PEMFC feront bien partie de la première génération de piles à combustible stationnaires, la seconde sera vraisemblablement de type SOFC », assure Arnaud Varoquaux, chef du Département Matériaux au CEA/Le Ripault.

La raison de cet enthousiasme tient dans le mode de fonctionnement des SOFC. Pour produire un courant électrique, les piles à oxyde solide doivent être soumises à des températures comprises entre 800°C et 1000°C. Cette gamme de températures permet alors d’utiliser directement les hydrocarbures, comme le gaz naturel, en guise de combustibles. Par cette chaleur, nul besoin de catalyseurs en métaux nobles, donc coûteux, pour activer la réaction de combustion de l’hydrogène. Le reformage, c’est-à-dire la réaction permettant de libérer l’hydrogène à partir d’une substance qui en contient, peut se faire en interne. Par ailleurs, la chaleur résiduelle peut être exploitée à son tour, directement ou pour produire de l’électricité par le biais d’une turbine à gaz par exemple. Dans ce cas, le rendement global pourrait atteindre 80% ! Voilà l’origine de l’engouement pour les SOFC dans le domaine des piles stationnaires.
Cependant, ces avantages restent actuellement… des inconvénients. Les très hautes températures de fonctionnement soumettent les matériaux à rude épreuve. Et la dilatation thermique pose de sérieux problèmes d’assemblage et d’étanchéité. C’est pourquoi le CEA, comme de nombreux industriels, tentent aujourd’hui de réduire les températures à 600°C, 700°C en cherchant de nouveaux électrolytes. Cette baisse devrait non seulement limiter le stress appliqué à la pile mais également élargir le choix des matériaux entrant dans sa composition (comme l’acier inoxydable pour les plaques bipolaires). « Le CEA travaille également à l’intégration du reformage interne progressif qui permet l’alimentation directe de la pile par du méthane à l’anode », explique Arnaud Varoquaux. Le concept, démontré par Gaz de France (qui est aussi le partenaire du CEA dans ce projet), nécessitera évidemment la mise au point d’un nouveau matériau pour l’anode. En France, la technologie SOFC n’en est donc qu’à ses premiers balbutiements. Mais c’est aussi la plus riche de promesses.

En tube ou en plan ?

Aujourd’hui, dans le domaine des piles stationnaires à oxyde solide, deux technologies s’affrontent. La première et la plus ancienne est dite tubulaire. Anode, électrolyte et cathode sont disposés de façon concentrique et forment de longs tubes dans lesquels les gaz circulent. Le plus récent prototype, qui fournit 105 kilowatts électriques, a été installé aux Pays-Bas. Des durées de fonctionnement de plus de 50000 heures ont également été atteintes avec cette technologie. « Cette dernière marche très bien mais elle reste très chère, indique Arnaud Varoquaux. Et à mon avis, il n’y aura pas de rupture technologique qui permettra de réduire substantiellement les coûts. » Le CEA et ses partenaires européens ont donc misé sur une seconde option : l’architecture plane. Plus proche des autres formes de piles à combustible, ce système plus compact devrait fournir de meilleures performances. Il reste à résoudre certains points, notamment celui de l’étanchéité.

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